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Loi séparatisme : une grave atteinte aux libertés associatives

Alors que la loi « sécurité globale » vient d’être définitivement adoptée par l’Assemblée nationale, la loi pour le « respect des principes républicains », ou loi séparatisme, est désormais débattue en commission mixte paritaire, après que le Sénat a adopté une version durcie du texte de loi le 12 avril 2021.

Le projet faisant l’objet d’une procédure accélérée, il doit désormais être validé définitivement par cette commission où les parlementaires doivent tenter de trouver un accord sur un texte commun. À défaut, une nouvelle lecture sera organisée dans chacune des chambres, l’Assemblée nationale ayant le dernier mot.

Ce texte, comme nous l’avons dénoncé dans une tribune publiée dans Libération le 21 janvier 2021, « constitue une atteinte sans précédent aux socles de notre République et menace nos libertés les plus fondamentales ».

L’objectif de cette loi bâillon ?

Action de Greenpeace France avant le 2e tour des élections présidentielles pour rappeler les valeurs de la République.
Mai 2017, © Pierre Baelen / Greenpeace

Encadrer, contrôler et sanctionner davantage l’action des associations alors que ces dernières œuvrent pour des sujets reconnus d’intérêt général. Le texte témoigne d’une volonté de bâillonner encore davantage les libertés associatives, dans un contexte sanitaire où nous subissons déjà des restrictions exceptionnelles de nos libertés fondamentales. En particulier, le projet de loi prévoit d’instituer un contrat d’engagement républicain (Chapitre II – Dispositions relatives aux associations).

 
Greenpeace France, aux côtés d’autres associations environnementales, est concernée dans la mesure où nous disposons d’un agrément qui facilite nos actions en justice et nous reconnaît comme acteur pouvant participer à l’action publique en matière environnementale. Le projet de loi prévoit que la délivrance de ces agréments soit désormais soumise au respect de ce contrat, alors même que ces agréments font déjà l’objet d’un contrôle a priori par l’exécutif (le ministère de l’Environnement). Une condition qui vient s’ajouter dans un contexte peu rassurant, les associations anti-corruption Sherpa et Anticor ayant fait face à des blocages répétés de l’exécutif dans la délivrance de leur agrément.

L’agrément est symboliquement important : l’État reconnaît que Greenpeace France agit pour la protection de l’environnement.  L’agrément porte sur l’objet social de notre association, nos objectifs de protection de l’intérêt général, et un contrôle au-delà de cet objet social (sur nos modes d’action non violents, par exemple) porterait une atteinte disproportionnée à la liberté d’association.

La mobilisation s’intensifie

manifestation ndevant l'Assemblée nationale

Manifestation des associations devant l’Assemblée nationale.
Février 2021, © Max du collectif La Faille

Le 15 février dernier, nous  avons manifesté devant l’Assemblée nationale, la veille du vote solennel après la première lecture. Aux côtés d’autres associations, nous  dénoncions une « loi bâillon », et en particulier les notions floues visées dans le contrat républicain, tel que l’ordre public, notion vague dont l’appréciation reviendrait au ministère de l’intérieur.

 
Le Conseil d’État l’a admis en premier dans son avis : « Les mesures du projet de loi concernent pratiquement tous les droits et libertés publiques ». Le Conseil a également souligné, tout comme le Défenseur des droits, que ce contrat comporte des « notions sujettes à interprétations antagonistes » et des « incertitudes » qui ne manqueraient pas d’introduire de sérieux risques d’arbitraire. Par ailleurs, le Défenseur des droits s’inquiète de ce que ce projet participe d’un « renforcement global du contrôle de l’ordre social ».

La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), quant à elle, a réaffirmé dans son second avis sur le projet de loi que « malgré les modifications apportées par l’Assemblée nationale, ce texte doit faire l’objet de nombreuses révisions. Les dispositions du projet de loi posent problème en particulier à deux titres : elles ont vocation à être appliquées largement alors qu’elles visent des situations très spécifiques et certaines d’entre elles portent atteinte aux droits et libertés fondamentales ».

Le 7 avril 2021, la veille du vote solennel au Sénat, Greenpeace France a co-signé une lettre ouverte adressée au Sénat sur proposition de la Ligue des droits de l’homme, afin de réaffirmer « notre totale opposition à cette loi fourre-tout, qui propose des mesures tantôt imprécises, tantôt disproportionnées, mais globalement dangereuses pour les libertés, notamment au regard d’un certain nombre de libertés fondamentales ».

Malgré les interpellations et le risque de censure du Conseil constitutionnel si celui-ci était saisi, la version adoptée par le Sénat n’est pas revenue sur le contrat d’engagement républicain. Il a, au contraire, adopté des dispositions renforçant un climat de suspicion généralisé, notamment à l’encontre de la communauté musulmane et des minorités (interdiction d’accompagner les sorties scolaires pour les mères voilées, interdiction des réunions non mixtes).

Nous surveillerons avec attention le débat parlementaire de ces prochaines semaines. Nous continuerons également de défendre sans relâche nos libertés d’opinion et de manifestation, si essentielles face aux épreuves que nous traversons et pour la démocratie, et d’alerter les citoyennes et citoyens sur ces dérives sécuritaires..